Guy Benaderette
Psychothérapeute et Psychanalyste à Paris 17
Guy Benaderette
Psychothérapeute et Psychanalyste à Paris 17

Les embrouilles familiales


Je vais m’autoriser ce petit tour (semi-sérieux) de l’approche freudo-lacanienne des conflits familiaux classiques, avec un langage simple, un zeste d’humour, et sans obligation d’avoir lu L’interprétation des rêves ou Écrits en VO.

Freud, Lacan et les embrouilles familiales

La famille, c’est un peu comme une pièce de théâtre qui se rejoue tous les jours, mais où les personnages n’ont pas toujours lu le script. Freud et Lacan ont passé beaucoup de temps à observer ces pièces... et à en faire des théories parfois brillantes, parfois incompréhensibles, mais souvent très éclairantes sur nos petites (ou grandes) tensions familiales.

1. Père-fille : Œdipe, talons aiguilles et autorité

Chez Freud, la petite fille traverse un moment de rébellion douce qu’il appelle le complexe d’Œdipe : elle veut inconsciemment remplacer maman dans le cœur de papa. Ce n’est pas qu’elle veut "sortir avec lui" au sens premier (heureusement), mais plutôt être l’élue. Du coup, tension avec maman, compétition symbolique, drames en tutu.

Lacan, lui, ajoute une couche de langage : il dit que le père, c’est celui qui "nomme" la fille, qui lui donne une place symbolique dans le monde. Si le père est trop absent ou trop autoritaire, la fille peut soit rester "accrochée" à lui symboliquement (bon courage aux futurs amoureux), soit ne jamais trouver vraiment sa place. Bref : pas simple, papa.

2. Mère-fils : amour fou et gros nœuds

Freud ici dit : "Attention danger". Le fils est d’abord très proche de maman, voire un peu trop. Encore une fois, c’est inconscient : il veut être l’homme de la vie de maman, mais ça crée de la tension. Le père doit alors venir poser une limite symbolique : "Eh oh, c’est ta mère, pas ta copine".

Lacan appuie très fort sur ce point. Si le père ne joue pas son rôle de tiers séparateur, la mère et le fils peuvent rester dans une fusion étouffante, où chacun empêche l’autre d’exister en dehors du duo. Le fils reste un "fils à maman", même à 45 ans avec un abonnement à la salle de sport. Et la mère ne voit plus que par lui. Résultat : conflits, jalousies, impossibilité de se détacher sans culpabilité.

3. Mère-fille : miroir, rivalité et tricot émotionnel

Ah, le duo mère-fille ! C’est souvent très fusionnel… jusqu’au jour où l’ado jette un regard noir en criant : "Je suis PAS comme toi !". Freud voyait là un jeu de miroirs : la fille cherche chez sa mère un modèle féminin… mais en même temps veut s’en différencier. C’est "je t’aime, mais je te déteste aussi, et passe-moi ton mascara."

Lacan dirait que tout se joue dans le désir de la mère : qu’est-ce que la mère veut, au fond ? Si elle attend trop de sa fille (réaliser ses rêves, faire mieux qu’elle, ou rester collée affectivement), la fille risque de se perdre ou de se rebeller fortement. On appelle ça : un dimanche tendu autour du rôti.

4. Père-fils : rivalité, admiration et héritage symbolique

Ici, Freud voit une compétition directe : le fils veut inconsciemment "tuer le père" pour prendre sa place. Encore une fois, on parle de symbolique, pas de scène de crime. Le père est vu comme un rival, un modèle, un mur à franchir.

Lacan dira que le fils attend du père qu’il le reconnaisse comme homme, qu’il lui transmette quelque chose de structurant : une règle, une place, une direction. Mais si le père est trop écrasant ou trop flou, ça crée du conflit : soit le fils se rebelle à fond, soit il s’écrase. Et parfois, ça alterne dans la même semaine.

Ce que ça donne en thérapie

En thérapie, on ne va pas chercher qui a "raison", mais ce que chaque conflit dit du désir inconscient de chacun. On écoute ce qui se répète, ce qui coince, ce qui fait symptôme (c’est-à-dire ce petit truc qui revient sans qu’on sache pourquoi).

Le thérapeute va chercher à faire parler, à entendre les non-dits, les retournements de langage, les fausses blagues pleines de vrai malaise. Il ne donne pas de solution rapide, mais il aide à mettre du sens sur ce qui se joue entre les générations, les sexes, les rôles.

Et parfois, comprendre que "ma mère m’énerve parce qu’elle me ressemble trop" ou "je m’oppose à mon père pour exister à ses yeux", ça débloque déjà pas mal.

En conclusion

Les conflits familiaux sont rarement une question de "mauvais caractère". Pour Freud et Lacan, ce sont des scènes symboliques, des répétitions d’histoires plus profondes. En comprenant un peu ce qui se trame en coulisses, on peut commencer à sortir de la pièce… ou à la rejouer autrement.

Et si tout ça vous donne mal à la tête : rassurez-vous, même Lacan disait qu’il fallait parfois s’y perdre un peu pour s’y retrouver.


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